5 janvier 2017
Fermeture de la chasse au caribou : les Québécois privés d'un bien collectif
Québec, 5 janvier 2016 - Un important chapitre de l’histoire de la chasse au Québec est sur le point de se conclure, alors que le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) a annoncé, le 21 décembre dernier, la fermeture de la chasse sportive au caribou migrateur à compter du 1er février 2018. C’est avec incompréhension que la Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs (FédéCP) accueille cette nouvelle. Pour l’organisation, qui a pour mission la défense des droits des chasseurs et pêcheurs québécois, il s’agit d’une démonstration du manque de vision du gouvernement quant à la mise en valeur des ressources fauniques nordiques du Québec.
Il va sans dire que la FédéCP est elle aussi préoccupée par l’état du cheptel de caribous et sait que de nombreux facteurs peuvent être invoqués pour expliquer les baisses survenues alors que le cheptel avait atteint des sommets anormalement élevés. Le surbroutage de la végétation ainsi que la hausse du nombre de prédateurs comptent parmi ces causes. Récemment interviewé sur les ondes de Radio-Canada, Steeve Côté, chercheur à l’Université Laval et directeur de Caribou Ungava, mentionnait que le réchauffement climatique est lui aussi de plus en plus soupçonné, notamment parce qu’il engendre un dérangement accru des caribous par les insectes et provoque un déphasage entre l’essor de la végétation assurant les meilleures conditions de lactation et la période de mise bas.
Si les constats scientifiques permettent d’avancer que plusieurs facteurs interviennent concurremment pour expliquer le déclin du caribou (les populations du Québec et du Canada sont en déclin, de même que celles d’autres pays) nul ne peut prétendre que la chasse sportive est l’une des causes directes de ce déclin et qu’un prélèvement raisonnable et balisé aggraverait la situation. Comment peut-on expliquer le maintien de la chasse au caribou pour certaines populations dans le Nord-Ouest canadien et en Alaska alors que ces troupeaux sont aussi marginaux et même plus que celui de la Rivière aux Feuilles ?
Il importe de défendre le principe d’accès équitable aux ressources fauniques de notre province, d’autant plus que cette décision aura d’importantes répercussions économiques et sociales ; la chasse au caribou est une activité touristique qui génère d’importantes retombées économiques autant dans le Nord québécois que dans les grands centres. Les pertes engendrées touchent directement des centaines d’emplois reliées aux pourvoiries, en plus d’affecter indirectement plusieurs autres acteurs connexes, comme les hôteliers, les centres de débitage et les compagnies de transport.
Au Québec, la chasse sportive est encadrée par des plans de gestion adaptés aux réalités des espèces, qui ont pour objectif d’assurer la pérennité des ressources fauniques et de leurs habitats. Cela permet de mettre en valeur de façon responsable des ressources fauniques parfois plus vulnérables, comme le saumon atlantique, par exemple, et d’ainsi stimuler les retombées économiques et sociales liées au prélèvement de cette espèce, tout en assurant sa viabilité. En 2015, bien que les chasseurs sportifs aient récolté 23 % de la population d’orignaux, jamais le nombre d’individus recensés n’avait atteint d’aussi hauts sommets (125 000 individus estimés). La même année, la chasse au caribou du troupeau de la Rivière aux Feuilles a touché moins de 1 % d’une population somme toute abondante (199 000 individus estimés) qui, en regard du précédent plan de gestion, aurait pu supporter une chasse modérée.
Par cette décision, il apparaît donc évident que le gouvernement répond finalement aux demandes des communautés autochtones membres du Comité conjoint de Chasse, Pêche et de Piégeage. Depuis 2010, il est clair que les mesures toujours plus restrictives annoncées chaque année allaient conduire à cette décision drastique de fermer la chasse. Si le prélèvement par les autochtones des communautés Cries, Inuits et Naskapis peut être poursuivi, la FédéCP maintient qu’une part aurait dû être réservée à la chasse sportive, en respect du principe de ressource collective et des différents plans de gestion et ententes.
Alors que le MFFP écarte du revers de la main les avis, les demandes et les questions des intervenants du milieu faunique sur le sujet, il est flagrant que la politique joue un rôle important dans la gestion de ce bien collectif qu’est la harde de caribous de la Rivière aux Feuilles, au détriment des activés de chasse sportive. Pour la FédéCP, témoin de l’importance des chasseurs comme partenaires de la gestion de la faune au cours des dernières décennies, il aurait été beaucoup plus profitable de maintenir des liens avec l’industrie de la chasse sportive plutôt que de la faire disparaître. Si les chasseurs et les pourvoyeurs désertent le nord, le MFFP perdra d’importants alliés.
Par ailleurs, puisque les nations autochtones membres du Comité conjoint de Chasse, Pêche et de Piégeage signataires de la convention de la Baie-James ont déclaré qu’elles assureront le suivi de leur récolte afin de préserver une saine gestion des troupeaux de caribous migrateurs au cours des prochaines années, la FédéCP demande que soient publiées les données recueillies, considérant qu’il s’agit d’une ressource collective appartenant à tous les Québécois, autochtones et allochtones.
Pour la FédéCP, il est grand temps que le gouvernement se dote d’une conception durable et intégrée du milieu faunique et qu’il reconnaisse les retombées positives engendrées par les activités de prélèvement pour l’ensemble du Québec. Régler une situation de façon aussi peu visionnaire et unilatérale ne peut que déplacer le problème tout en générant au bout du compte bien plus de pertes que de bénéfices.
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Source : Stéphanie Vadnais
Conseillère en communication
Fédération québécoise des chasseurs et pêcheurs
Tél. : (418) 878-8901 / 1 888 LAFAUNE
@ : stephanievadnais@fedecp.com