Mentorat - L'apprentissage qui mène à une heureuse récolte !
Une histoire de chasse racontée par Pierre Roy
On dit qu’une chasse au gros gibier ça se prépare, mais que ça se vit sur le terrain. Croyez-moi, l’histoire qui suit en est le parfait exemple!
Au printemps 2017, j’entre en communication avec un ami, Guy Poulin, afin de voir s’il est intéressé à m’accompagner pour une chasse à l’orignal. Je viens d’avoir une opportunité pour chasser ce grand cervidé à la pourvoirie Domaine la Sorbière au Saguenay, un séjour d’une semaine de chasse à la carabine en pleine période du rut. Il me répond aussitôt « OUI » et me dit qu’il va chercher deux compagnons de chasse pour nous accompagner.
Lorsque Guy me confirme le nom des autres participants, Rock Gamelin et Marco Pelletier, il me mentionne que ceux-ci n’ont jamais chassé l’orignal. Qui plus est, Marco en sera à sa première expérience de chasse, toutes espèces confondues! Face à des compagnons de chasse qui sont très peu expérimentés, le mentor a comme responsabilité d’être drôlement bien préparé.
Puisqu’il s’agit d’un tout nouveau territoire de chasse pour moi, je vais visiter à deux reprises la pourvoirie pendant l’été afin de le prospecter et de visiter d’une part les salines faites par les gens de la pourvoirie et de voir, d’autre part, s’il y a la possibilité d’en faire d’autres. Une bonne prospection n’est pas un gage de succès absolu, mais elle vous permet parfois de découvrir des endroits fascinants (photo ci-dessous) et elle vous donne en plus d’immenses informations qui pourraient s’avérer très utiles pendant la période de chasse.
Photo: L'Appel du Roy
Il est important ici de mentionner que nous chassions dans la zone 28. Dans cette zone, pour 2017, tous les segments de la population d’orignaux étaient autorisés. Toutefois, considérant le niveau d’expérience de mon groupe, il aurait été inutile et inapproprié de ma part de donner des limites de grosseurs à mes compagnons de chasse, d’autant plus qu’à cette période de l’année en 2017, nous avons vécu une canicule même au nord du Saguenay. La seule chose que j’ai demandé à mes gens, c’était de s’assurer qu’en présence d’une femelle, qu’il n’y ait pas un veau avec elle.
Une autre responsabilité du mentor est de s’assurer, avant le départ, que tous ont bien vérifié et calibré leur arme à feu, car, au-delà de l’inexpérience, la pratique du tir est essentielle avant la chasse. C’est une question de sécurité pour soi-même et de respect autant pour l’animal que pour ses compagnons de chasse.
Nous y sommes, la chasse débute le 23 septembre 2017. La caméra de surveillance que j’avais laissée sur place pendant l’été nous avait montré de magnifiques spécimens.
Toutefois, en visitant ce lieu de chasse le matin de l’ouverture, celle-ci me révèle que les orignaux ne fréquentent plus ce secteur depuis plus de 2 semaines, je dois donc changer mes plans. J’explique à mes compagnons quelle stratégie je prévois désormais déployer.
La chasse se poursuit samedi après-midi et dimanche matin. Il fait chaud, trop chaud ! Les pistes fraîches sont rares et les autres chasseurs présents à cette pourvoirie n’ont pas eu de succès eux non plus jusqu’à présent. Considérant cette température, j’essaie de couvrir le plus de terrain possible avec ma gang, on explore le territoire à la recherche de signes intéressants.
Le dimanche midi, Marco, notre chasseur qui vivait sa première expérience de chasse, me montre plusieurs photos prises avec son cellulaire ; différents types de crottin, des pistes, etc. Évidemment, tout est nouveau pour lui alors il a une panoplie de questions. Je réponds avec plaisir à ses questions en ajoutant : « cet après-midi, tu vas chasser juste avec moi, je vais en profiter pour t’expliquer plein de choses ». C’est ainsi que Marco et moi sommes partis pour un secteur que j’avais visité au mois d’août et pour lequel je fondais de bons espoirs.
Peu de temps après avoir débuté notre marche dans ce secteur, j’ai pu lui montrer des pistes fraîches d’orignaux, c’était très positif. Nous avons marché lentement jusqu’à une intersection de chemins, un endroit propice pour une vision lointaine du gibier. Je lui ai alors dit : « va voir ce petit bout de chemin, mais revient t’installer ici rapidement et reste à l’affût, il pourrait se présenter un orignal à n’importe quel moment. Pendant ce temps-là, je vais aller prospecter l’autre versant de la montagne, je serai de retour vers 19hrs ». Il était 17hrs.
Un peu avant 18h45, je décide de quitter mon poste où je faisais quelques appels de femelles afin d’aller rejoindre Marco tel que convenu. J’ai à peine débuté ma marche que BANG, j’entends un coup de feu raisonner avec l’écho de la montagne, ça semble venir de la position de Marco. J’accélère immédiatement le pas et peu de temps après, j’arrive à son poste d’affût. J’y vois une chaise, une cartouche non utilisée au sol, mais pas de Marco. Soudainement je l’entends, il me crie, je le vois là-bas, plus bas, me faisant de grands gestes avec ses bras. Je vais le rejoindre. Imaginez, il vient de tirer sur son premier gibier et pas n’importe lequel ; un orignal !
Il est surexcité, voire même légèrement confus. Je lui parle calmement, je veux qu’il m’explique ce qui s’est passé. Il me dit : « J’ai entendu du bruit, mais je n’étais pas certain. J’ai tout d’un coup vu un orignal au loin, mais un arbre m’empêchait de le voir clairement. Lorsqu’il s’est présenté sur le bord du chemin j’ai voulu le tirer, mais le coup n’est pas parti (d’où la cartouche non utilisée par terre près de sa chaise). Je l’ai éjectée pour en remettre une nouvelle (mécanisme à verrou) mais là, l’orignal a entendu ça et il m’a regardé, c’est là que j’ai réalisé que c’était un mâle. Ça m’a énervé un petit peu, mais j’ai quand même réussi à replacer mon angle de tir et j’ai fait feu. Je l’ai vu partir à la course de l’autre côté du chemin ».
D’entrée de jeu, j’ai félicité Marco. Qu’il ait été en mesure de tirer malgré que son premier coup n’ait pas fonctionné, BRAVO. Il m’assure qu’il est certain d’avoir touché l’animal, il visait la zone vitale derrière la patte avant. Toutefois, je regarde autour de moi et je ne vois aucune piste fraîche et aucun autre signe dans le chemin. Je lui explique ce que je recherche et pourquoi je le fais. On décide de laisser sa chaise là où il pensait avoir atteint l’animal, comme point de repère, et d’aller chercher de l’aide. On marche en direction du camion, on fait environ 100pi et V’LAN, des belles pistes toutes fraîches dans le chemin, les pistes d’un mâle qui m’indiquent que l’animal est parti brusquement. Je dis à Marco « je pense plutôt que ton orignal était ici et non là-bas ». Il regarde le tout et il réalise qu’effectivement, il devait se trouver là. On déplace à nouveau sa chaise à cet endroit. Il est rendu passé 19hrs, la noirceur est très proche (on avait le droit de tirer jusqu’à 19 h 07). Je refuse d’aller voir si on pouvait le trouver, je dis à Marco qu’il faut le « laisser mourir », ne rien brusquer. On quitte ce lieu immédiatement.
Tout au long de notre retour pour aller chercher de l’aide, Marco est nerveux, anxieux. Je lui dis : « tu as vécu plusieurs émotions en peu de temps : l’adrénaline de voir l’animal, de tirer l’animal et de le voir disparaître. Là, tu vis l’angoisse de la recherche ; va-t-on le retrouver? Si on a le bonheur de le retrouver, tu n’as pas idée à quel point ton adrénaline va être au maximum. » Il me répond ; « je trouve que c’est pas mal au maximum comme ça !!! »
Rendus au point de rencontre de tous les chasseurs et des gestionnaires de la pourvoirie, la plupart de ceux-ci avaient entendu le coup de feu. J’explique la situation, tous sont confiants de le retrouver. On se rend au lieu où j’avais vu les pistes de l’orignal, tout le monde participe à la recherche, recherche qui va durer finalement que quelques minutes, ce mâle de 1½ an aura fait moins de 100pi avant de s’écrouler. Un tir parfait dans les poumons avec sa carabine de calibre 270, et ce, à une distance de 140m ; 462 pi ! Super Marco !
Marco est debout, immobile, il regarde la bête sans voix, sans mots, tout le monde saute et danse autour de lui, le félicite. Il a le teint pâle. Il me dit : « tu avais raison Pierre, c’est très intense ».
Photo : Marco Pelletier
Quelques instants plus tard, Marco se penche près de sa bête, il la touche doucement, la regarde de près. Ce moment de recueillement restera gravé à jamais dans sa mémoire ; quel beau geste de respect envers l’animal qu’il vient de récolter !
On y va avec les traditionnelles photos, des souvenirs importants pour tous les gens présents.
Il fait noir, mais peu importe, je fais l’éviscération de la bête et les gens de la pourvoirie nous aide à sortir la bête de sa position, on l’embarque dans la remorque attachée au VTT et on retourne au camp. C’est la fête !
Le lendemain matin, Marco était serein, il réalisait ce qu’il venait de faire. Il examine la bête, sa beauté, sa grandeur, sa grosseur. Il est content, conscient de ce qu’il a fait, abattre un animal, mais heureux du dénouement. Je lui explique le soin à apporter à un gibier abattu. Considérant la température chaude, les gens de la pourvoirie s’affairent rapidement à couper l’animal en quartier et on va le porter à la chambre froide.
On est retourné au lieu d’abattage le mardi matin, question pour Marco de fermer la boucle, de revoir la scène en plein jour, de revivre ce moment privilégié. Il a même pu récupérer sa cartouche vide. C’est un moment important, souvent négligé par les chasseurs que de retourner à cet endroit, de refaire la scène telle qu’elle s’est déroulée.
Pour compléter l’apprentissage de mon apprenti, pourquoi pas une petite séance de chasse au petit gibier. Ce même mardi matin, nous avons croisé des couvées de tétras. Après avoir personnellement récolté ma limite quotidienne de 5 oiseaux, je prête mon fusil de chasse de calibre 410 à Marco afin qu’il puisse récolter son premier tétras, ce qu’il réalise avec brio. C’était amusant de voir sa réaction lors du tir : « wow, c’est dont bien le fun un 410 ». Je répète, tout était nouveau pour lui !
Je n’ai pas abattu cet orignal, mais croyez-moi, comme mentor, je suis drôlement fier de tout ce qui a été accompli avec mon groupe. J’ai prospecté, étudié les cartes (papiers et via les différents sites web), préparé et guidé mon groupe, et voilà que les résultats sont là. Un nouvel initié qui, à 35 ans, est désormais un « accro » à la chasse, dans le respect de l’animal et des règles établies. Mission accomplie !
N’hésitez pas à regarder ma page Facebook de L’Appel du Roy ou visitez mon site web au www.lappelduroy.com.






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